Ou le train-train des Germains
Encore un paysage qui file sous les roues de mon train.
Ce doux roulis, ces larges fenêtres et ce monde qui défile, décidément, m’inspirent. Ou bien est-ce le voyage qu’ils représentent ?
Je glisse vers l’est, comme un lien à travers l’histoire d’un pays, d’une nation si étonnants. Le beau est là, j’en suis persuadé, mais tellement différent ! Une telle histoire, par sa propre force presque anéantie, reconstruite de briques et de toque avec un seul mot d’ordre : efficacité. Les lignes sont droites, les trains sont à l’heure ; les gens travaillent et ne rechignent guère ; pour la grandeur de l’industrie, de leur place dans l’Europe.
C’est dans ce contexte curieusement stimulant pour la productivité personnelle du Français que je suis que je m’épanouis de mes responsabilités.
Out of the box était le leid motiv. Il m’a fallu à peu près trois mois pour bien saisir les rouages : de la langue, déjà, de l’entreprise aussi, mais surtout des gens qui m’entourent, qui m’apprennent parce qu’ils attendent ensuite de moi que je leur apporte du nouveau, de ce qu’ils n’ont pas dans leur box.
Et il y en a.
Nous pénétrons soudain dans une casserole retournée sous la chape de laquelle une violente pluie fait rage. Une énorme enseigne VW perce pourtant la brume. Je distingue les lettres de cette ville inconnue : Wolfsburg, où quatre immenses cheminées et des toits comme les crocs d’un loup qui cracherait l’orage sont sûrement le symbole d’une réussite industrielle telle que ce peuple en a besoin pour se lever matin.
Le train repart – mes pensées aussi.
Relations. Humaines. Internationales. Il suffit de lire le mot voyage en filigrane et pour moi tout y est.
Je suis rentré par la petite porte, qu’on m’a de surcroît tenue ouverte, au cœur de cette entreprise à mes yeux inexpérimentés si surprenante. Le département clé, central, puissant et utile mais sous-estimé et trop mal connu… Les RH, bien sûr !
Je rencontre du monde, je les mets en relation, je leur parle leur langue, je propose, j’améliore et là encore, toujours, j’apprends, et j’aime ce que j’apprends, sur moi comme sur le monde qui m’entoure.
Que demander de plus ? (Un salaire de stagiaire qui me permette de payer mon loyer peut-être ?)
Le train sort du brouillard, le temps a l’air plus calme au-dessus de Berlin. Je développe mon potentiel – merci mon pote-en-ciel ? Non…
Extrait de « Ich bin ein pfiffiges Kerlchen », Mer. 1er avril 2015