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COP 23 : dernier espoir pour les Fidji ?


A l’occasion du lancement de la conférence de Bonn, 23ème Conférence des Parties, ce lundi 6 novembre 2017, de nombreux médias font le point sur les décisions importantes prises à l’égard de l’environnement et vis-à-vis de notre impact sur la nature.

Il y a bien sûr eu la COP 21 à Paris, en décembre 2015, où l’on a clamé haut et fort le grand pas en avant dans l’engagement des 196 États participants, à travers le fameux Accord de Paris, ratifié par 169 d’entre eux l’année dernière à Marrakech, qui vise à limiter le réchauffement de la planète à 1,5°C au mieux, 2°C au max.

Et puis cette année, ce sont les îles Fidji qui président la réunion à Bonn, en Allemagne. Un symbole fort, quand on sait que les îles du Pacifique Sud sont menacées de submersion par la montée du niveau de l’océan, et que le réchauffement des eaux perturbe leur écosystème marin environnant.

Logo de la COP 23 présidée par les îles Fidji.

Votre correspondant a pu se rendre dans un petit village de cet archipel, où l’on n’a guère de télévision pour suivre de près les décisions prises à l’autre bout du monde, mais où celles-ci auront un impact direct sur leur mode de vie et leur avenir.

Kiuva contre les vagues du changement

À la pointe extrême sud-est de Viti Levu, l’île principale de l’archipel des Fidji, il est un petit village d’une cinquantaine de familles appelé Kiuva.

Posé sur le littoral, le village fait face à l’océan. Seule une barrière de corail à environ trois kilomètres de la côte protège celle-ci des puissantes vagues du large et des éventuelles lames de fond. Ses habitants vivent principalement de la pêche, peu d’entre eux vont étudier en ville et la vie avance au rythme des deux saisons et des vagues ; bref, Kiuva a tout d’un petit village tropical sans histoire.

Mais deux choses ont rendu ce village intéressant pour l’objet de cet article.

La première est que ce bout de bord de mer était victime d’inondations de plus en plus fréquentes, jusqu’à ce que tout le village soit inondé à chaque marée haute.

La seconde est ce qui sauva le village : l’un de ses habitants est devenu Premier ministre du gouvernement fidjien. L’attention médiatique s’est donc portée sur Kiuva et sa désastreuse situation. On l’a érigé en exemple des conséquences du dérèglement climatique et des mesures ont été prises dans tout l’archipel pour adopter un mode de vie plus durable, notamment sur les transports, la consommation d’emballages et la gestion des déchets.

Surtout, on a construit un mur en béton sur toute la longueur de la plage de Kiuva ainsi que des canaux de drainage à travers le village pour évacuer l’eau et diminuer la force de résistance que le mur doit opposer à l’océan.

Cette digue a permis d’assainir le sol du village et les habitants ont pu réinvestir leurs foyers sans se mouiller les pieds.

La digue de béton sépare la mer du village, Kiuva, Fidji.

Un découragement général

La situation à Kiuva est donc un exemple qui a permis à une nation de prendre conscience des conséquences du dérèglement climatique.

Cependant la solution apportée ne cherche pas à résoudre les causes de ce changement. Il s’agit bien d’une réaction, on agit face à un constat qui nuit à la sécurité d’un lieu de vie, mais non d’une initiative proactive ; pour limiter les dégâts, mais non pour adapter son mode de vie.

L’humeur générale ressentie lors de différentes interrogations des habitants pourrait se résumer par la déclaration du chef du village : « Que peut-on faire face à tout un océan d’erreurs passées ? » C’est une sorte de découragement qui caractérise en effet l’état d’esprit des autochtones.

On m’a souvent répété que, quand bien même tous les Fidjiens changeaient leur mode de vie brusquement et n’auraient plus qu’un impact négligeable sur leur environnement, ils ne représentent qu’une goutte d’eau dans l’océan des activités humaines favorables au dérèglement climatique : Kiuva écope des méfaits du reste de la planète et, si Fidji change, rien n’indique que toutes les nations du monde changeront aussi.

Des enfants jouent le long d'un canal de drainage à Kiuva.

Déjà trop tard ?

Le cas de Kiuva est donc caractéristique des populations qui font le constat d’un changement, car celui-ci a des effets directs, mesurables et néfastes, tout comme les exemples de l’Alaska et de la Mongolie également abordés sur ce blog, mais qui à la différence de ces derniers n’ont guère d’alternative à soumettre.

Le sentiment de défaitisme latent vient de la conscience du fait que le problème est d’ampleur planétaire et de l’impression que des changements à l’échelle locale n’auront jamais l’impact suffisant à inverser la tendance – et à plus forte raison sur une île menacée de submersion.

Aussi quand on leur parle d’une Conférence des Parties, les Fidjiens disent souvent qu’ « ils peuvent bien décider ce qu’ils veulent dans leurs buildings bien au-dessus du niveau de la mer ; ici on sait qu’il est déjà trop tard : la mer est là. »

Pourtant, pour finir sur une note plus optimiste, leur Premier ministre Frank Bainimarama qui préside actuellement la COP 23 à Bonn, originaire justement du village de Kiuva, lance le message suivant :

« Partout où nous vivons, nous sommes vulnérables et devons agir. Fidji aide à construire une grande coalition pour une action décisive et coordonnée des gouvernements, de la société civile, du secteur privé et de tous les citoyens de la planète ».

Pour ceux qui y croient encore, n’oublions pas que le changement vient d’abord de nous-mêmes.

Le "Sea Wall" devient un terrain de jeu pour les enfants du village.


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