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Scénario post-confinement : un nouvel équilibre ?


26 juin 2020.

La semaine dernière, le gouvernement a officiellement annoncé la fin du confinement, après avoir pu tester la population française en quantité significative, et grâce à la production industrielle d’un dérivé de l'hydroxychloroquine.

Emmanuelle Macron enjoignait ses chers compatriotes à « regagner, dès lundi, leur poste respectif au sein de leur entreprise », à « contribuer à échelle individuelle et collective à la relance de l’économie nationale et européenne », tout en assurant les entrepreneurs, artisans et indépendants du soutien massif de l’État bla-bla.

Sauf que dès le lendemain, samedi, un nouveau mot-clé est apparu sur les réseaux sociaux : #NotGoingBackToWork.


Parti d’un collectif écologiste auvergnat, l’idée de « ne pas retourner au travail » a vite été reprise par d’autres mouvements : les syndicats ouvriers, en contestation des multiples remises en cause des acquis sociaux au nom de la « solidarité » et de la relance économique (abolition des 35 heures dans les secteurs de l’alimentation et du médical notamment, revue à la baisse des congés payés et du délais de prévenance pour en imposer à ses salariés, etc.) ; les enseignants, dont le travail n’a pas été valorisé malgré leur incroyable adaptation en période de confinement ; les salariés du tertiaire qui ont visiblement pris goût au télétravail avec modération, et qui ne souhaitent pas revoir leur chef et leur open space… et bien d’autres invisibles qui, sans partager quoi que ce soit en ligne, sont simplement restés chez eux, comme les semaines précédentes !

Quant aux personnels soignants, dont on connaît le sacrifice dans la lutte contre le coronavirus, ils se sont également approprié le mot clé pour dénoncer le manque de moyens alloués aux hôpitaux, malgré les beaux discours de remerciement des autorités et la reconnaissance éternelle du grand public.

Idem du côté des employés des grandes surfaces et autres détaillants, qui ont dû continuer à travailler sans beaucoup de moyens pour approvisionner la France pendant 4 mois !

"La routine avait un goût de périmé."

Résultat : le lundi d’après, le pays restait au ralenti.

Et le mouvement s’est d’autant plus fait ressentir qu’au cours de la semaine, les routiers et les transports ont rejoint le mouvement de grève générale. Du coup, des rayons vides et des supermarchés fermés, des pompes à essence à sec, des métros à l’arrêt, bref des villes bloquées.

La population n’a pas voulu reprendre le business as usual, retourner au boulot comme avant, travailler-pour-gagner-pour-consommer-pour-polluer… la routine avait un goût de périmé après des mois au placard !

La fameuse relance du gouvernement a fait long feu.

Cela fait 6 jours que cette grève a été lancée et elle n’a cessé de s’amplifier.

Mais depuis avant-hier, un autre mouvement a émergé, comme une ramification du premier.

Avec les mots-clés #SocialReboot et #NouveauDépart, des associations, des collectifs, et même des collectivités locales comme le village de Lablachère en Ardèche, ou La Bussière-sur-Ouche en Côte-d’Or, ont montré qu’il était possible de s’organiser différemment pour ressortir de chez soi, recréer du lien social, avec soi et avec son environnement, sans dépendre du modèle néo-libéral qui domine encore actuellement nos nations occidentales : en cultivant des terrains partagés près de chez soi, en se réappropriant l’éducation de nos enfants et le soin de nos aînés, en réapprenant la communication non violente et le langage des émotions, en développant les compétences du vivre-ensemble et du faire soi-même

Des modèles alternatifs qui avaient bien sûr émergé auparavant, mais qui semblent séduire bien davantage depuis la fin du confinement.



La brèche dans le mur de l'Ancien Régime


Aussi quand, ce midi, le Premier Ministre Édouard Philippe a pris la parole, c’était poussé par la peur.

En effet, les grandes bourses du monde n’ont pas redécollé en une semaine comme tout le monde l’espérait. Enfin, « tout le monde » … celles et ceux qui voulaient croire encore au modèle pré-coronavirus. Et cela a dû faire peur aux gouvernants, aux riches, aux classes qui décident. Mais elles ont bien vu qu’elles n’y pouvaient rien : à quoi rimaient ces quelques descentes de gendarmes dans des résidences particulières, exhortant les habitants à retourner au travail ? Les télés étaient sur place, la France entière, depuis son salon, a été choquée que l’État lui-même ne respecte pas des principes de base comme la propriété privée, le respect de l’individu et surtout la liberté d’action et d’opinion.

On ne peut pas lutter par la force contre ses propres lois.

Alors le chef du gouvernement n’a pas eu le choix : il a fait une ouverture.

Reprenons le discours de Monsieur Philippe :

« Il me semble qu’il s’agit de trouver à présent un juste milieu. Un équilibre est à trouver entre les revendications légitimes des Français, leurs envies de davantage de Nature, de temps pour soi, de liens sociaux, intergénérationnels et familiaux, (…), et les besoins d’un pays qui, au cœur de l’Union européenne, nécessite une mobilisation nationale pour que chacune et chacun ait de nouveau accès aux biens et aux services de base d’une société cohérente et unie.
« C’est pourquoi, en lien avec le gouvernement et le Président de la République, nous proposons une semaine à plusieurs vitesses, avec des jours dédiés à la famille et à la communauté locale, dont l’organisation relèverait des Maires et des Préfets de régions, et avec des jours dédiés au bien commun national, qui relèveraient encore de l’État et du gouvernement.
Les Députés et Sénateurs, issus eux-mêmes de la variété des territoires de notre pays, veilleraient alors à la bonne articulation de ces deux échelons. »

Et ce fut comme la première brèche dans le mur de Berlin : depuis, tout s’effrite, tout se délite. Et les agents de l’État, les patrons d’entreprises côtés en bourse et leurs actionnaires, tous ses gardiens de « l’Ancien Régime », restent pantois aux checkpoints, à regarder passer les foules, sans pouvoir agir.

Les mots de l’auteur Bernard Werber, dans son Livre du Voyage, n’ont jamais eu autant d’écho :

« Ne t’attaque pas au Système, démode-le ! »


Dans l’après-midi, un collectif de 800 scientifiques et médecins, issus de 6 pays européens, a publié un vibrant appel à mettre leurs compétences gratuitement à disposition de ces communautés locales nouvellement constituées, en échange d’un endroit où dormir et de la nourriture de base.

Où l’on retrouve l’échange libre des services contre des biens, déconnecté de toute monnaie et de tout profit, de toute consommation superflue, de toute influence mondialisée et déraisonnée.

Il a suffi d’un virus, qui au final a fait moins de morts en France que la grippe saisonnière, en Europe que la pollution de l’air, dans le monde que le diabète, pour voir apparaître les prémices d’une société recentrée, reconnectée à soi, à l’autre et à son environnement – à l’image de ces communautés religieuses, musulmanes, juives et chrétiennes qui se sont spontanément réunies pour ramasser les déchets autour des lieux de cultes et dans les villes depuis la fin du confinement, comme si tout à coup, on ouvrait des yeux sans filtres sur ce qui nous entoure.

Le « Système » était bien démodé, mais il manquait une bonne claque pour que tout le monde se rende à l’évidence et se tourne vers les solutions émergentes. Une pandémie a giflé la mondialisation, et nous nous réveillons du coma dans lequel nous étions endormis depuis trop longtemps.

Bien sûr, il y en aura toujours qui ne voudront pas changer.

Et il en faut ! Elles prendront l’avion pour une courte semaine à l’autre bout du monde, ils créeront du profit et achèteront des actions, des dettes, des concepts et autres biens imaginaires… Peut-être certains gouvernements dans le monde continueront de détruire leur nature locale pour vendre des aberrations chimiques ou minières à l’autre bout du monde : après tout, ils ont encore les armes pour imposer leur vision du monde.

Mais rien n’est éternel. Si les alternatives se développent, tranquillement, un peu partout, sans chercher à s’imposer, juste en montrant que c’est possible, alors même les plus puissants de l’Ancien Régime viendront y regarder de plus près et dire : « Montrez-nous un peu, c’est comment le bonheur, pour vous ? »…

Regarde.

Non seulement le Système commence à se lézarder.

Mais c’est lui qui vient examiner ton travail.

Le Système t’encourage à continuer.

C’est ça qui est incroyable.

Le Système n’est pas « méchant », il est dépassé.

Le Système est conscient de sa propre vétusté.

Et il attendait depuis longtemps que quelqu’un comme toi ait le courage de proposer autre chose.

Les enchaînés commencent à discuter entre eux.

Ils se disent qu’ils peuvent faire de même.

Soutiens-les.

Plus il y aura de créations originales, plus le Système ancien devra renoncer à ses prérogatives.

- Le Livre du Voyage, Bernard Werber (1997)




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